Bilan 2011

Publié le par Scritch

Comme l'année dernière, je précise que, c'est une évidence, mon temps libre et mon budget ne me permettent de voir qu'une infime partie de ce qui sort en salle, même si je m'efforce autant que possible de varier les plaisirs dans mes choix de films - c'est-à-dire que je vois en général deux films en salles par semaine, une grosse sortie et un truc un peu plus pointu. Entre snobisme et beauferie, je ne tranche pas, et si j'essaie d'équilibrer mon temps entre films d'origines et de statuts divers, je m'efforce autant que possible de n'en pas tenir compte dans mon avis - et donc, si m'horripile ce totalitarisme publicitaire des films obligatoires, je ne défendrai pas pour autant, sauf faiblesse du coeur bien tolérable, un petit film juste par plaisir de jouer David contre Goliath.

Ensuite : il va de soi que hiérarchiser les films n'est pas chose aisée (ni même très maligne) tant les critères, les raisons de s'intéresser à un objet cinématographique sont multiples. Je n'ai pas forcément retenu le plaisir pur, immédiat (l'hilarant Halal Police d'Etat aurait alors été en tête), préférant l'impact durable, le labour creusé profond. A l'exception de Scream 4, tous les films retenus m'ont mis dans un état proche du recueillement ; je les ai reçus comme j'aurais reçu, si j'étais croyant, la parole du Christ.

 

Et donc les grands vainqueurs sont :

 

10 How Do You Know, James L. Brooks, modèle de comédie intelligente, sorte de Rohmer américano-mainstream, mis en scène avec une grande précision discrète

8 exaequo Meek's Cutoff, Kelly Reichardt et Blackthorn, Mateo Gil, deux westerns contemplatifs visuellement tétanisants et traversés de questionnements politico-philosophiques en douceur

7 Dernière Séance, Laurent Achard, film inespéré, comme tourné exprès pour moi, sorte de croisement fou entre Bresson et Argento, dont chaque plan suinte l'amour absolu du cinéma - nécessaire et fabuleux : un film qui nous fait croire que Georges Franju et Jean Rollin ne sont pas tout à fait morts

6 Somewhere, Sofia Coppola, captation mélancolique et d'une grande douceur de la violente beauté de Los Angeles

5 Scream 4, Wes Craven, véritable plaisir intellectuel, presque mécanique dans sa virtuosité froide, très drôle et cinéphile comme il faut

4 Senna, Asif Kapadia, drame romantique poignant bien que construit avec des images télévisuelles de bagnoles

3 Essential Killing, Jerzy Skolimowski, peut-être bien le film le plus purement audiovisuel (c'est-à-dire : de l'image et du son) vu cette année

2 Cave of Forgotten Dreams, Werner Herzog, rêverie éveillée, expérience sensorielle ultime qui prouve que le relief n'est pas juste un bidule destiné à faire cracher deux euros de rab au cochon de payant

1 Rise of the Planet of the Apes, Rupert Wyatt, un grand film de SF doublé d'un mélodrame bouleversant sur la condition humaine

 

En bonus, parce qu'un peu bancal, mais suffisamment attachant et singulier pour être mentionné ne serait-ce qu'en passant : Road to Nowhere, le petit grand retour de Monte Hellman, avec un film qui pose inlassablement la seule question qui vaille : Qu'est-ce que la Beauté ?

 

A côté de ces réussites dont la variété est une raison de plus de se réjouir, une tendance un peu douloureuse de 2011 : pas mal de grancinéastes m'ont semblé avoir cruellement raté leurs films (enfin, j'espère qu'ils les ont ratés, car s'ils sont arrivés à ce qu'ils visaient, c'est réellement inquiétant) ; je parle de Malick avec Tree of Life, d'Eastwood avec Hereafter, de Von Trier avec Melancholia (trois âneries new age en plus d'être des films pas terribles), de Van Sant avec Restless, d'Aronofsky avec Black Swan, films qui, même si d'autres grancinéastes ont livré de bons voire très bons films (Almodovar, Allen, Spielberg, les Coen) m'ont incité, peut-être à tort, à esquiver les derniers Cronenberg et Polanski, par crainte. Certes ces films ne sont pas intégralement nuls, la fin du Van Sant est très belle, comme un miracle in extremis, et les premières demi-heures du Malick et de l'Eastwood sont même magnifiques, mais enfin, rien vraiment qui vaille un bon Van Damme.

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